Des médecins signalent le harcèlement sexuel de leurs supérieurs à l’hôpital : J’espère que tu as pris une bonne contraception.

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À l’époque, Juliette est interne. Mariée et enceinte, la jeune femme se méfie de ce praticien hospitalier qu’elle connaît de réputation : «Il était connu pour avoir harcelé plusieurs infirmières», explique-t-elle aujourd’hui.

Alors Juliette évite de le croiser. En vain : «Il n’arrêtait pas de me faire des allusions sexuelles».

Un soir de garde, la jeune femme, en proie à de nouvelles remarques embarrassantes, décide de le confronter : «Je lui ai demandé si ça ne le dérangeait pas de draguer une femme qui attend un enfant». L’homme, âgé d’une cinquantaine d’années lui rétorque, bravache : «Justement, ça m’arrange, car je suis sûr de ne pas te mettre enceinte».

Il y a des hommes qui, par leur statut, se permettent de tenir des propos déplacés, sales même, sur telle collègue ou même sur telle patiente, déclare-t-elle. «J’ai parlé de lui, mais ce que je cherche à dénoncer surtout, c’est une atmosphère générale», explique ce samedi au Figaro la chef de service hospitalier des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine (Paris).

«C’est comme si certains avaient un totem d’immunité et que la parole était décomplexée», explique la Karine Lacombe. Victoire en d’ailleurs fait les frais en tant qu’externe dans un hôpital breton : «J’avais des propositions telles que “Si tu passes dans ma chambre de garde à minuit, je ferai en sorte que tu dormes le reste de ta garde”», raconte-t-elle.

Il était juste derrière, il s’est plaqué contre elle et lui a dit : “J’espère que t’as pris une bonne contraception”. Il y a une omerta avec des médecins qui se sentent puissants : je ne compte pas le nombre de commentaires sur les tenues des femmes, ou sur leur corps, abonde Lucie.

Cette dernière raconte : «Un jour, alors que j’étais en quatrième année de médecine, j’ai voulu poser quatre jours vacances». «Je suis sortie du service en pleurant».

«J’ai été interne puis externe dans les années 90. J’ai vécu mon lot de gestes déplacés et d’agressions», raconte une première.

Tandis qu’une autre alerte : «Externe puis interne à cheval sur les années 2010-20. À deux reprises, la main d’un chef s’est retrouvée sur ma cuisse sans que je ne sache ni pourquoi ni comment.

Tellement sidérée que je n’ai même pas pu réagir. Et cela aurait pu être bien pire».

D’après les syndicats et les spécialistes, ces anecdotes sont loin d’être nouvelles : «Ça fait des semaines, des mois, des années, qu’on essaye de faire sortir ça», a déclaré Emmanuel Hai, le président du Syndicat Internes hôpitaux Paris auprès de nos confrères de BFMTV. On est au courant de certaines personnalités problématiques et malheureusement il y en a un certain nombre».

Pour Karine Lacombe, s’il l’objectif n’est donc pas de lyncher des hommes en public ou même de les condamner – car il s’agit du travail de la justice – il faut faire changer les choses. Les prénoms ont été modifiés.

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